Nancy. Dans un rapport publié aujourd'hui, le Secours Catholique tire la sonnette d'alarme sur une pauvreté qui continue de s’étendre. Notre interview de Stéphane Terreaux, délégué permanent du Secours Catholique en Meurthe-et-Moselle.
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www ici c nancy fr - Photo Cristhophe Hargoues / Secours Catholique 

Toujours plus sombre, le constat effectué par le Secours Catholique en Meurthe-et-Moselle est sensiblement le même qu’au niveau national. Avec, quelques spécificités liées à l’actualité du département et de la région, ainsi l’association note dans son rapport la poursuite de la dégradation de l’emploi et de l’économie en Lorraine, "avec la perte de 2 à 3 % des emplois dans l’industrie, la construction, l’hébergement-restauration... et de 13 % des emplois intérimaires en 2012". Autre constat, "L’avantage tiré de la situation frontalière s’affaiblit, avec plusieurs vagues de licenciements au Luxembourg qui sont à l’origine de situations très difficiles, du fait des complications administratives retardant l’accès aux indemnités de chômage" note également le Secours Catholique. L’an dernier, l’association qui compte 737 bénévoles sur le département a recensé 6894 situations de précarité en Meurthe-et-Moselle.

Dans le rapport annuel que le Secours Catholique publie aujourd’hui, un des premiers constats est que la pauvreté s’aggrave et s’enracine...

Effectivement, la pauvreté ne réduit pas malgré toutes les bonnes attentions ou démarches qui sont proposées à tous les niveaux même au niveau de l’état, on observe un durcissement de la précarité. Les personnes que nous recevons sont à 95 % en dessous du seuil de pauvreté.

Qui sont ces femmes, ces hommes qui franchissent les portes du Secours Catholique ?

Nous recevons des gens de structures familiales différentes, de diverses populations, majoritairement des adultes isolés et des familles monoparentales. Il y a beaucoup d’hommes seuls en situation de précarité et également des familles monoparentales qui sont surtout composées de mamans isolées avec des enfants. Les mères vivent parfois des situations très compliquées qui s’expliquent surtout par l’emploi. Pour travailler, il faut faire garder les enfants ce qui coûte aussi cher que le salaire si l’on retrouve un travail. C’est une équation impossible ! Il y a aussi des couples avec ou sans enfants.

Un autre thème est aussi pointé par le rapport du Secours Catholique à savoir la précarité énergétique. C’est une réalité dans notre département ?

C’est une réalité dans toute la France, elle est forte en Meurthe-et-Moselle, de plus en plus de familles n’arrivent plus à payer leurs factures d’énergie, l’énergie augmente et elle va continuer à augmenter c’est une certitude. Les ressources n’augmentent pas, le nombre de personnes en dessous du seuil de pauvreté augmente et ça devient une équation insoluble, pour les familles les plus modestes. C’est une dépense qu’on ne peut pas baisser, comme dans le domaine du textile, où l’on va pouvoir rechercher des vêtements d’occasion. La dépense d’énergie ne peut pas être comprimée si elle est consommée. 

Comment agit le secours catholique face à autant de problématiques ?

De manière générale, ce qu’on a le plus à offrir c’est de l’écoute et un lieu d’accueil. En ce moment s’ouvre la collecte nationale du secours catholique, le mois de novembre permet d’aller au-devant du public, car c’est grâce à eux qu’on agit. Effectivement on a besoin d’argent, on attribue des aides, on met en place un certain nombre d’activités. Ça complète le côté humain qui est notre première vocation, d’être accueillant, d’être fraternel et d’offrir aux gens quelque chose qui donne un temps à vivre. A côté de ça, nous avons beaucoup d’activités, d’aides matérielles, financières ou autres. Nous œuvrons également avec la mise en place d’activités pour faire sortir les gens de leur précarité leur permettant un accès à la culture ou en alimentant certains projets de vacances avec les familles...

Sur le caractère énergétique, nous pouvons être amenés à participer à des financements, c’est plus du quart des aides que nous attribuons. Seulement dans la plupart des cas, il faut reconnaitre que nous sommes très souvent impuissants, lorsque des gens arrivent avec des impayés de 1000, 2000 € ou plus.. Nous n’avons pas le budget pour régler ces factures. Notre objectif n’est pas de financer le bénéfice des sociétés qui vendent de l’énergie, mais d’accompagner les familles.

On en vient au budget du Secours Catholique, est ce qu’il se stabilise ou est-il au contraire en baisse avec cette conjoncture économique qui se dégrade ? 

Le budget se compose essentiellement de la générosité du public, les 2/3 sont issus des dons de particuliers, nous avons également la participation avec des ventes ou des projets de sortie. Les subventions extérieures sont de l’ordre de 12 % chez nous (Ndrl la délégation de Meurthe-et-Moselle). Nous sommes très indépendants des pouvoirs publics et très dépendants de la générosité du public. Pour le moment ça se passe bien, si les pouvoirs publics restreignent leurs subventions notre public nous reste fidèle. On tient bon. Il nous manque une dizaine de bénévoles pour mener à bien les actions que nous voudrions développer. 

Quelles sont les propositions du Secours Catholique pour diminuer la précarité ?

Le point qu'on a souhaité mettre en avant c’est la précarité énergétique, on a un constat très clair. Aujourd’hui il existe des dispositifs de solidarité dans ce champ avec la participation des fournisseurs d’énergie sauf que la plupart des fournisseurs d’énergie sont arrivés après la libéralisation du marché et en sont dispensés en quelque sorte. Il  n’y a qu’EDF GDF qui financent les fonds de solidarité logement et ça, ça nous paraît complètement anormal parce qu’une grande partie des personnes en précarité sont clients chez les autres. Et, pour une partie des autres, la solidarité, ils ne connaissent pas. Certains mettent en place des pratiques commerciales trompeuses, on leur fait croire qu’ils vont payer 70 € par mois et après ils reçoivent la facture de régularisation de 1500 € ! C’est tout à fait malhonnête ! Pour nous, il y a quelque chose à voir du côté du législateur, par rapport à cette solidarité sur l’énergie qui est quelque chose d’incomplet. Au niveau national on parle beaucoup de l’emploi, sur l’accompagnement, le partenariat entre les différents acteurs, les missions locales... De manière générale, l’une de nos premières préoccupations c’est le regard que l’on porte les uns sur les autres, c’est la solidarité entre les personnes, sans aller forcément aller rechercher des structures, il pourrait y avoir une solidarité de voisinage, un regard attentif les uns sur les autres, c’est un appel à toute la société. D’autant plus criant qu’aujourd’hui notre société tourne un peu mal, on voit qu'il y a des partis extrémistes qui montent, il y a des tendances xénophobes, de la stigmatisation des plus pauvres. Les temps sont durs et c’est pour ça qu'il faut que l’on se serre les coudes.

Les prochains rendez-vous ?
Après la publication du rapport du Secours Catholique aujourd’hui, le grand moment d’activité sera le 17 novembre avec la collecte nationale. Des actions sont programmées en paroisse, mais aussi ailleurs, avec un Bal Folk à Neuves-Maisons et à Dieulouard, des présences dans les magasins pour les emballages cadeaux, sur les marchés...  
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