NANCY. A la veille de la Journée internationale des Filles célébrée ce vendredi 11 octobre, la Ville de Nancy a annoncé la création d'un observatoire des violences faites aux filles. C'est Dominique Sigaud, grand reporter, écrivain et essayiste qui pilotera le projet.
C’est une opération importante et une association prometteuse entre la Ville de Nancy et Dominique Sigaud, grand reporter, écrivain et essayiste. La lauréate du 18e prix Livre et Droits de l’Homme de la Ville de Nancy auteure de « La malédiction d’être fille » (Albin Michel) a été choisie pour piloter le premier observatoire des violences faites aux filles.
Dispositif inédit, la Ville de Nancy engagée dans la défense des droits des hommes et des femmes, impliquée dans la lutte contre toutes les formes de violence, veut faire progresser les données actuelles en terme de violences faites aux filles afin d’impulser de nouvelles politiques novatrices. Un engagement public fort initié par une volonté de faire bouger les lignes. Des agissements silencieux pour lesquels il convient « d'abord de les reconnaitre, les décrire, les mesurer, les concevoir pour mieux les combattre » a affirmé le maire de Nancy.
Les violences exercées sur les mineures, une réalité silencieuse
Dominique Sigaud a sillonné divers territoires du monde comme l’Inde ou l’Afrique pour appréhender l’ampleur des violences exercées sur les filles. « Ces violences faites aux filles, c’est un invariant de l’histoire humaine, un invariant actuel, contemporain », explique la journaliste lors d’une conférence de presse.
Dominique SIGAUD
Les chiffres sont glaçants. « Une fille sur cinq, dans le monde, subit des violences sexuelles avant 18 ans. En France, 40% des viols et tentatives de viol concerneraient des mineures de moins de 15 ans », poursuit Dominique Sigaud. Des statistiques au conditionnel, car en réalité les chiffres manquent de données précises. Il y aurait chaque jour en France entre 100 à 200 viols et tentatives de viol, dont l’inceste. Elle découvre lors de ses recherches l’absence de donnée. « C’est à dire qu’on a des données sur des viols de femmes majeures, mais pas sur les mineures » s’alarme-t-elle.
« C’est stupéfiant qu’il n’existe pas d’étude d’État, d’étude nationale sur un sujet aussi important. Dans mon livre, je dis qu’à minima il faut créer un observatoire des violences faites aux filles, je commence à travailler le sujet... », raconte Dominique Sigaud qui se rend alors au Livre sur la Place pour la promotion de son livre. Là, elle confie sa surprise quant à l’accueil des lecteurs. Pédo-psychiatres, professionnels oeuvrant au contact des enfants... Nombreux sont celles et ceux qui se pressent à sa table pour échanger avec elle.
Une méthodologie présentée dès 2020 et des actions au printemps
La journaliste et la municipalité s’accordent sur la nécessité de mettre au point cet observatoire. Pour le mettre sur pied, il faudra « recenser, analyser, compiler des faits, des éléments objectifs pour dire les choses, accompagner les victimes, prévenir les filles, les parents... C’est aussi sanctionner et être proche de l’État » déclare Laurent Hénart.
Ce travail d'enquête et de synthèse mené par l’observatoire sera porté par différents partenaires. Pour cela, des rapprochements sont ainsi annoncés impliquant de nombreux acteurs comme l’éducation nationale, opérateurs de santé, accompagnants avec des collaborations avec la police, la gendarmerie, la préfecture, le parquet ou encore associations... Un travail partenarial pour mettre autour de la table celles et ceux qui peuvent apporter de l’information. Car Dominique Sigaud en est convaincue. « Tous, ont des savoirs sur la question ».
« On va prendre les moyens de savoir ce qu’il se passe réellement sur le territoire. Quels âges, qui sont les agresseurs, quelles sont les séquelles, quelles sont les suites juridiques, quelles sont les absences de suites juridiques pour arriver à un tableau réaliste. », souligne Dominique Sigaud.
L'observatoire s'appuiera sur une méthologie de travail qui débouchera sur des propositions concrètes dans un an au 11 octobre 2020. Les premières actions sont attendues au printemps. Site internet, téléphone, courriel vont être mis en place dans le cadre de cet observatoire. Le travail s'annonce immense et promet sans doute une libération de la parole des mineures victimes de violences voire même de jeunes adultes.
« C'est important que les filles sachent qu'une ville s'engage réellement à ne pas se taire et à vouloir savoir ce qu'il se passe.» dit Dominique Sigaud.