C’était l’époque où les acteurs mouraient bien trop jeunes. Jean Harlow, 26 ans, James Dean, 24 ans, Carole Lombard, 33 ans. C’est à cette dernière que Vincent Duluc consacre un livre memoriam. Titre : « Carole et Clark ». Car cette blonde aux yeux d’azur eut néanmoins le temps d’épouser Clark Gable.
Née Jane Peters dans un bled de l’Indiana et sœur cadette de deux frères, elle leur avait un jour demandé d’énumérer toutes les injures qu’ils connaissaient. Et les avaient apprises. Utile bagage pour se défendre plus tard face à quelques acteurs entreprenants. Commode aussi pour rabattre le caquet de Clark Gable, surnommé le « king », ce qui ne l’impressionnait guère.
Débit mitraillette
Entreprenante, drôle et dotée d’un débit mitraillette, elle le rencontre le 23 janvier 1937 au White Mayfair Ball qu’elle a organisé à Beverley Hills. Code vestimentaire : tout le monde en blanc. Il s’y plie et la remarque. Objectif atteint, car « Carole organisait peu de fêtes. Elle voulait juste qu’on s’en souvienne ».
À la Saint Valentin suivante, elle lui fait livrer une vieille Ford peinte de cœurs géants, de rubans et de fleurs partout. Le soir, il pilote cette « vieillerie » chez elle, ouvre la porte pour qu’elle puisse s’y glisser en robe du soir et les voilà partis au Trocadéro. Comme si elle se gardait pour l’élu, elle avait un jour formalisé son ambition, explique l’auteur : « devenir la plus recherchée des jeunes filles chastes ». Et s’arranger aussi pour que ses premiers amoureux ne soient « ni pauvres, ni mauvais danseurs, ni sans voiture ».
Dans la foulée, elle se choisit un nom de scène. Ce sera Carole, auquel elle ajoute Lombard « parce que ça fait français et distingué ». Prudente, elle apprend enfin à monter à cheval « parce que les femmes tourneront bientôt dans les westerns, mais, cette fois, sans chantonner au coin du bar en crinolines ».
Premier mariage
Le 26 juin 1931, elle épouse Richard Powell avec qui elle vient de tourner « The Man in the World ». Cet « homme du monde » est brun, grand, la moustache élégante et fait partie des trois mousquetaires. Traduisez « les trois célibataires les plus populaires de Hollywood ». En lui, Carole aime « l’aristocratie, le luxe, la bonté et l’acteur ». En elle, il apprécie « la beauté et la franchise ». Mais un couple ne dure qu’à condition qu’aucun ne cherche à changer l’autre. Ce ne sera pas le cas. D’où divorce en août 1933. Il aura ce constat : « Elle voulait sortir. Il voulait rentrer ».
15 décembre 1939. Carole, désormais épouse du « roi » depuis fin mars, accompagne Clark Gable à la première d’ »Autant en emporte le vent » à Atlanta. Elle n’est pas jalouse de Vivian Leigh, car elle sait que son homme déteste « l’Anglaise ». Grand seigneur, il dit aux 2331 spectateurs qui l’acclament : « Ce soir, je suis seulement spectateur. Car c’est le soir de Margaret Mitchell et des gens d’Atlanta ». Le retour néanmoins sera triste, car elle perd le bébé qu’elle attendait alors que Gable se languit d’un fils.
Il reste également peu de temps à leur amour, car, en janvier 1942, Carole Lombard va mourir dans un accident d’avion. À 33 ans et au retour d’une levée de fonds en Indiana pour financer la guerre qui ensanglante l’Europe.
Enterrée à Glendale
Fleuri de gardénias et de deux compositions florales figurant le drapeau américain, le cercueil de Carole sera déposé au cimetière de Forest Lawn à Glendale (sud de Los Angeles) où Clark Gable repose désormais à ses côtés.
En conclusion, Vincent Duluc, journaliste sportif épris de 7e Art, a ce poétique constat : « La mort de Carole Lombard condamnait Clark Gable à vivre à perpétuité avec elle. Pour le meilleur, le pire et l’insurpassable. Car on ne quitte plus une ombre froide qui ne reviendra pas de la nuit ».
Fiona Franchi
« Carole et Clark » de Vincent Duluc, ed Stock, 18,50 euros
