FOCUS - Roman glaçant et addictif, « L’Institut » de Stephen King, publié en ce mois de février aux éditions Albin Michel, débute avec le kidnapping de Luke Ellis jeune surdoué de 12 ans et doté de faculté de télékinésie. Ses ravisseurs, un commando armé et ultra aguerri ramène l’enfant au sein d’une organisation occulte et suffisamment à l’abri des regards.

Compte à rebours terrifiant...

Stephen King a publié plus de 50 romans et quelque 200 nouvelles. Dans « L’Institut », le maître de l’horreur et du fantastique nous entraîne à l’aéroport de Tampa où Tim Jamieson, ex-flic, accepte de céder son siège, réservé sur un vol, contre plusieurs milliers dollars. Sur le chemin qui l’emmène à New York, son destin (bien inspiré) le fixe à DuPray, Caroline du Sud, petit village où il décroche un travail de veilleur de nuit. Mais, c’est le personnage de Luke Ellis, décrit dans la quatrième de couverture qui fige instantanément le récit et entame un compte à rebours vers un avenir scellé d’avance. Cet enfant surdoué scolarisé dans une école spéciale, accepté dans deux universités à seulement douze ans, subit chez lui un double drame. 

Au cœur de la nuit, à Minneapolis, un commando armé pénètre dans sa maison pour le kidnapper. Alors que ses parents sont sauvagement assassinés par arme à feu, le jeune garçon est drogué puis se réveille à « l’Institut », dans une chambre en tout point semblable à la sienne, sauf qu’elle ne dispose d’aucune fenêtre. Dans le couloir de cet établissement mystérieux, le jeune garçon va faire la rencontre d’autres enfants, dotés comme lui de pouvoirs psychiques.

« Un jour de juin, à deux heures du matin, alors que Tim Jamieson remontait la Grand-Rue du Dupray en frappant aux portes, un SUV noir tourna dans Wildersmoot Drive, une rue de la banlieue nord de Minneapolis. Un nom de rue débile. Luke et son copain Rolf l’avaient rebaptisée Wildersmooch Drive, parce que c’était encore plus débile et parce qu’ils rêvaient l’un et l’autre de galocher une fille, furieusement. Le SUV transportait un homme et deux femmes. L’homme se prénommait Denny, les femmes Michelle et Robin. Denny conduisait. Au milieu de la rue en courbe, silencieuse, il éteignit les phares, se gara le long du trottoir et coupa le moteur (...) Denny ouvrit l’accoudoir central pour prendre un téléphone portable qui semblait rescapé des années 1990 avec son boîtier massif et ses deux petites antennes. Il le tendit à Michelle. Pendant qu’il composait le numéro il souleva le double fond de l’accoudoir et en sortit des gants en latex très fins, deux Glock 37 et une bombe aérosol parfum linge propre ». 

« Elle n’eut pas besoin d’achever sa phrase. Certaines choses se raréfiaient. Les défenses d’éléphant. Les peaux de tigre. Les cornes de rhinocéros. Les métaux précieux. Même le pétrole. Maintenant, vous pouviez ajouter à la liste des enfants spéciaux, dont les qualités extraordinaires n’avaient rien à voir avec leur Q.I. Cinq nouveaux allaient arriver cette semaine, parmi lesquels le jeune Dixon. Une bonne prise, mais deux ans plus tôt, ils auraient peut-être été trente. »

► Domination totalitaire

Caché dans les vastes forêts de la région du Maine, un territoire cher à Stephen King que l’on retrouve dans d’autres de ses romans, l’Institut, centre d’expérimentation para-gouvernemental top secret hérité de la guerre mondiale, se révèle aussi glaçant que terrifiant. Avec une plume fluide, captivante et addictive, Stephen King dépeint toutes les facettes de cet univers carcéral où les petits prisonniers ne sont encore que des enfants arrachés à leur famille. 

Injections, chocs lumineux, expériences de noyade dans le caisson, dans ce lieu protégé des esprits curieux, les enfants y subissent des expériences et sévices traumatisants afin de décupler leur puissance mentale et leurs compétences extraordinaires comme la télékinésie ou la télépathie. Des conditions épouvantables exercées par leurs bourreaux, médecins ou anciens militaires, avec l’idée que la mesure est parfaitement adaptée aux enjeux et nourrit une grande cause. À savoir, un dessein « plus grand » celui de l’avenir de l’humanité. 

Des innocents sacrifiés pour le bien du monde. Une ambition s’illustrant par la propagande totalitaire décomplexée s’affichant à travers des slogans sur les murs de l’Institut comme « J’ai choisi d’être heureux », expression détournée et inspirée par Stephen King par d’autres comme « Arbeit macht frei » traduction allemande de « le travail rend libre » inscrite à l’entrée d’Auschwitz par les nazis... 

► Pourquoi on aime ?

Aux racines du mal, on retrouve dans ce roman, une pluralité de dimensions qui s’entrechoquent avec force, celle du fantastique nourri de la puissance des forces occultes, de la politique avec plusieurs références cinglantes à Trump, le thème de l’enfance menacée, de la violence avec le sujets des armes à feu ou des menaces planant sur l’humanité.  

Dans cette plongée horrifique dans les rouages de l’Institut, création de la folie des hommes, retentit la voix des bourreaux et de leurs commanditaires sadiques aveuglés par un dessein commun les conduisant à perdre leur conscience du bien et du mal. Mais aussi, celle d’une galerie de personnages plus lumineux, voire en quête de rédemption.

Le livre refermé, le lecteur ne pourra s’empêcher d’établir de nombreux parallèles dans l’histoire de l’humanité ou dans l’actualité géopolitique. Avec précision, réalisme brut, scènes de combat et d'échanges de tirs, d'une bonne dose d'imagination, Stephen King signe avec l’Institut un thriller palpitant d’une intensité émotionnelle qui croît au fil des pages. Une plongée haletante à l’intrigue d’autant plus soutenue par le caractère oppressant et violent de l’Institut. De la vie qui palpite malgré l’enfermement, l’espoir des enfants d’être un jour libérés s’amenuise. À moins que...


"L'Institut" aux éditions Albin Michel - 608 pages. Paru le 29 janvier 2020, 24,90 €

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