Lancé contre son ennemi mortel Moriarty dans une partie d’échecs dont l’enjeu sera la paix européenne, Sherlock Holmes revient dans un deuxième volet visuellement trépidant, en dépit d’un scénario qui frise parfois le ridicule. Le divertissement remplit néanmoins bien son rôle...
Le premier Sherlock Holmes version Guy Ritchie, sorti en 2009, offrait une rafraîchissante relecture des aventures du héros de Sir Arthur Conan Doyle, où se distinguait aussi une vision de la modernité naissante. Le XXe siècle s’annonçait, et avec lui l’ère de l’innovation industrielle, les transformations d’une société où la superstition commençait à décliner en faveur de l’âge de la technique et du développement des sciences. Modernité dont Sherlock Holmes, personnage capable de démêler les plus complexes énigmes grâce à un sens de l’observation et de la déduction sans faille, constituait une brillante incarnation. A cet intelligent parti pris, il fallait également ajouter le judicieux choix de casting : Jude Law en flegmatique Docteur Watson et Robert Downey Jr en exubérant détective. Le succès, tant critique que public, confirma que la recette était bonne.
Toutefois, y réaliser une suite n’apparaît pas aussi « élémentaire » que prévu, la difficulté étant de respecter l’imaginaire de Sir Arthur Conan Doyle tout en poursuivant son dépoussiérage ancré dans la modernité. Dans ce but, ce nouveau Sherlock Holmes s’est choisi un enjeu de taille : éviter l’éclosion de la Première Guerre Mondiale ! Lancés sur la piste d’attentats à la bombe, les deux acolytes dévoilent rapidement le complot du machiavélique Professeur Moriarty pour mettre l’Europe à feu et à sang.
Dès les premières scènes, le spectateur est prévenu : l’action sera au rendez-vous. Bien que les scènes de combat archi-chorégraphiées où Sherlock effectue des cascades dignes de grands maîtres du kung-fu ne soient pas exemptes d’un certain ridicule, il est difficile de nier la capacité de la réalisation trépidante à l’emporter dans ce tourbillon visuel. L’humour est également de la partie, notamment grâce au délectable duo Jude Law / Robert Downey Jr, qui confère à la relation Watson / Holmes une savoureuse ambigüité.
Malgré tout, il apparaîtra peut-être un peu difficile de suivre toutes les péripéties scénaristiques de ce jeu d’échecs entre Holmes et Moriarty. L’ambition démesurée de Moriarty se traduit en effet extrêmement bien sur le plan formel, mais laisse à désirer sur le fond. Les rebondissements frôlent souvent le grotesque, et le film est plaisant davantage pour la capacité des deux héros à résister aux balles, aux coups de couteaux, voire au bombardement d’obus, que pour sa crédibilité narrative.
Ce sont les clichés dans lesquels s’embourbe le film qui nuisent peut-être le plus à son propos. Ainsi tentant de déjouer les mécanismes par lesquels l’Europe court vers son autodestruction, le Sherlock Holmes de Guy Ritchie reste prisonnier des rouages de la machinerie hollywoodienne, et passe à côté. Certes, le duel entre Holmes et son mauvais génie Moriarty pouvait prêter à un certain manichéisme, mais celui-ci est réducteur : car plus qu’un affrontement entre le bien et le mal, le jeu d’ombres pensé à l’origine par Sir Arthur Conan Doyle est celui d’un grand esprit confronté à sa propre antithèse, tout aussi brillant mais dans sa version la plus sombre. Le jeu des nations auquel il est tenté de faire référence ici fut autrement plus complexe, le personnage de Sherlock Holmes originel beaucoup plus ambivalent.
Du point de vue du pur spectacle, il reste toutefois un très agréable divertissement, où l’action et la comédie se mêlent astucieusement, ainsi qu’une très belle scène finale, relativement fidèle à l’esprit des romans.
Notre avis:
Sherlock Holmes 2 : Jeu d'ombres
Aventure (02h07min)
De Guy Ritchie
Avec Robert Downey Jr., Jude Law
Sherlock Holmes a toujours été réputé pour être l'homme à l'esprit le plus affûté de son époque. Jusqu'au jour où le redoutable professeur James Moriarty, criminel d'une puissance intellectuelle comparable à celle du célèbre détective, fait son entrée en scène… Il a même sans doute un net avantage sur Holmes car il met non seulement son intelligence au service de noirs desseins, mais il est totalement dépourvu de sens moral. Partout dans le monde, la presse s'enflamme : on apprend ainsi qu'en Inde un magnat du coton est ruiné par un scandale, ou qu'en Chine un trafiquant d'opium est décédé, en apparence, d'une overdose, ou encore que des attentats se sont produits à Strasbourg et à Vienne et qu'aux Etats-Unis, un baron de l'acier vient de mourir…
Personne ne voit le lien entre ces événements qui semblent sans rapport, hormis le grand Sherlock Holmes qui y discerne la même volonté maléfique de semer la mort et la destruction. Et ces crimes portent tous la marque du sinistre Moriarty. Tandis que leur enquête les mène en France, en Allemagne et en Suisse, Holmes et Watson prennent de plus en plus de risques. Mais Moriarty a systématiquement un coup d'avance et semble tout près d'atteindre son objectif. S'il y parvient, non seulement sa fortune et son pouvoir seront sans limite, mais le cours de l'Histoire pourrait bien en être changé à jamais…
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