elles-ncyConsidérations oiseuses d’une bourgeoise lassée par sa petite vie ennuyeuse et son frigo qui ferme mal sur le délicat sujet de la prostitution étudiante, Elles constitue un horripilant brassage de clichés, maladroit dans le fond comme sur la forme. Ratage total.

 

   

A l’heure où le débat sur la prostitution divise la société française, Elles vient y mettre son grain de sel, en s’attaquant (extrêmement mal) au problème de la prostitution étudiante. Anne, journaliste pour un célèbre titre de presse dite « féminine », enquête sur le sujet. Pour les besoins de son reportage, elle rencontre donc deux jeunes filles qui louent leur corps en échange de quelques billets, afin de payer leurs études et d’arrondir des fins de mois difficiles.

Seulement voilà, dès les premières minutes du film, le spectateur acquiert la certitude effarante qu’aucun cliché ne lui sera épargné : Lola / Charlotte compare son activité à l’addiction au tabac ; explique en souriant jusqu’aux oreilles que se prostituer, c’est beaucoup plus sympa que de travailler dans un fast-food, parce que ça prend moins de temps et que ça rapporte plus. Le pompon est peut-être décroché quand, interrogée quant à la « normalité » de ses relations tarifées, elle distingue pour seule différence avec sa véritable relation amoureuse le fait que la majorité de ses clients ait l’âge de son père !

Tantôt hautaine, tantôt en totale connivence vis-à-vis de ses interlocutrices, Anne, la « journaliste » aux méthodes d’investigation et de travail franchement douteuses (pour ne pas dire éthiquement répréhensibles) remet en question sa propre vie de petite bourgeoise engoncée dans son quotidien familial. La voici donc en bute à ses fantasmes non-assumés, à un mari négligeant, à un fils tête à claques, à ses kilos en trop, au dîner qu’elle est censée concocter pour le patron de son mari. Mari qui l’enjoint d’ailleurs d’éviter de perturber le dîner en question « avec ses trucs féministes ». Ah, parce que le personnage est féministe ? On est bien content que quelqu’un nous le précise : de par sa vision culpabilisante de la sexualité, son goût pour les clichés, son attachement strict à la normativité latente, on n’avait pas remarqué. Cette héroïne aussi égocentrique qu’agaçante ainsi que la réalisatrice affichent pourtant bien des prétentions pamphlétaires. Mais la maladresse de Malgorzata Szumowska en la matière est telle qu’elle passe à côté de tous ses objectifs.

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D’abord il faut souligner le fait édifiant que la réalisatrice s’essaye à la dénonciation d’une forme de prostitution bien particulière, en milieu étudiant, sans jamais se préoccuper du milieu en question. La vie quotidienne, universitaire des deux jeunes filles ne l’intéresse absolument pas. Seul leur rapport au corps, au sexe, à leurs michés, entre dans le champ de sa caméra. Lola prétend tout maîtriser, et il faut qu’elle soit victime d’un « client sadique » - selon les termes-mêmes du générique ! - pour que la réalisatrice puisse démontrer que ce n’est pas le cas. Alicja, décontractée par la vodka, explique que se payent ses services des hommes qui ne peuvent assouvir leurs fantasmes avec leurs femmes. L’une et l’autre ont de toute façon très bien intégrée l’idée que leur corps suscitait la concupiscence, alors plutôt que de se rebeller contre l’objectivisation sociale de leur beauté, pourquoi ne pas la monnayer ? Non-contente de caricaturer ses protagonistes, Malgorzata Szumowska manque de la plus élémentaire subtilité dans sa mise en scène, où des gros plans interviennent fort mal à propos pour surligner au marqueur fluo ce qui aurait justement nécessité pudeur et délicatesse.

Sans parler de l’image sociale des femmes véhiculée par le film, il y a de quoi être atterré par le portrait qui est fait des hommes. Tous consommateurs, réduits à une dimension violente et bestiale. Ainsi, si Elles se voulait féministe, c’est râpé : de par sa réalisation grossière et les clichés qu’il véhicule à tour de bras, Elles est en réalité sexiste à tous les niveaux, aussi méprisant socialement qu’insultant pour les hommes ET pour les femmes. Pour compenser son manque de fonds argumentatif, Elles se fait verbeux. Pour pallier l’absence de ressource dramatique, Elles balance du Beethoven. Et au milieu de tout ça, le personnage de Juliette Binoche, qui l’inspire visiblement peu (mais on la comprend) pique sa petite crise existentielle pseudo-humaniste.
A vrai dire, endurer ces considérations lamentables pendant 1h36 se serait avéré totalement insupportable, n’eût été la présence rafraîchissante d’Anaïs Demoustier dans le rôle de Lola / Charlotte. La jeune actrice constitue néanmoins la seule bonne idée d’un film que l’on aurait probablement pu qualifier de scandaleux s’il n’était pas tout simplement aussi raté.

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Drame (01h36min) - Date de sortie : 01/02/2012

De Malgorzata Szumowska

Avec Juliette Binoche, Anaïs Demoustier

Interdit aux moins de 12 ans 

Anne, journaliste dans un grand magazine féminin enquête sur la prostitution estudiantine. Alicja et Charlotte, étudiantes à Paris, se confient à elle sans tabou ni pudeur. Ces confessions vont trouver chez Anne un écho inattendu. Et c’est toute sa vie qui va en être bouleversée.

 

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