CINÉMA. Le film sort en salle ce mercredi 23 avril. Rencontre à Nancy avec sa co-réalisatrice Elsa Bennett, qui lève le voile sur une addiction encore taboue, celle de l'alcoolémie chez les femmes.
En vidéo. Interview de Elsa Bennett à regarder ici
Ce mercredi 23 avril, Des Jours Meilleurs sort dans les salles de cinéma. Ce long-métrage réalisé par Elsa Bennett et Hippolyte Dard raconte le parcours de Suzanne interprétée par Valérie Bonneton, une mère de trois enfants contrainte de suivre une cure de désintoxication après un accident de voiture. Dans un centre pour femmes alcooliques, cette femme fait la rencontre de Diane (Michèle Laroque) et Alice (Sabrina Ouazani). Avec l’aide de Denis, éducateur sportif incarné par Clovis Cornillac, elles vont s’engager dans un défi inattendu : participer ensemble au Rallye des Dunes dans le désert marocain. Une traversée symbolique et réelle, entre résilience, amitié et reconquête de soi.
Si ce sujet touche peu souvent le grand écran, il a une résonance intime pour les réalisateurs. « On était tous les deux touchés de près par le sujet dans nos familles », confie Elsa Bennett, rencontrée à Nancy avant la projection du film en avant-première à UGC Ludres. « C’est encore un thème tabou, très sensible, et on s’est dit que c’était important d’en parler, de casser le silence. »
Le film s’est nourri d’un long travail documentaire. Les auteurs ont rencontré des addictologues, visité des centres de soin, et surtout écouté de nombreuses femmes ayant souffert d’alcoolisme. « Elles nous ont raconté leur parcours avec une sincérité incroyable. C’est à elles qu’on doit beaucoup.». La contribution de Laurence Cottet, ancienne alcoolique et à l'initiative citoyenne du mois Janvier sobre, a été essentielle : « Elle accompagne aujourd’hui d’autres femmes sur le chemin de l’abstinence. »
Une aventure humaine et sportive, symbole de résilience
Elsa Bennett, co-réalisatrice du film Des Jours Meilleurs
Le tournant du film s’incarne dans une idée forte : un rallye dans le désert marocain. Un choix de mise en scène audacieux. Cette traversée du désert, c’est une métaphore du combat contre l’addiction, explique Elsa Bennett. « Aujourd’hui, de plus en plus de centres proposent des activités sportives comme outils de reconstruction : aviron, vélo, motothérapie… Le désert, c’était une manière d’amener ça à l’écran, tout en conservant la tension de l’enfermement dans l’habitacle du 4x4, dans ce huis clos entre les trois femmes. »
Mais le tournage n’a pas été de tout repos. « Le jour du départ du rallye, les propriétaires des véhicules ont refusé que des femmes figurantes conduisent leurs voitures. On a dû mettre des perruques aux conducteurs pour faire croire à des femmes au volant ! », raconte-t-elle.
Porté par un casting remarquable, Des Jours Meilleurs marque aussi des rôles singuliers dans les carrières des actrices. Valérie Bonneton, Michèle Laroque et Sabrina Ouazani incarnent avec justesse ces trois femmes cabossées. « Valérie a été la première à lire le scénario, elle a tout de suite accepté. Le public les découvre dans un registre totalement différent. Quant à Clovis Cornillac, il incarne Denis, un éducateur sportif et ancien alcoolique. « Ce rôle était initialement écrit pour une femme », révèle Elsa Bennett.
Le tournage a eu un impact direct sur l’équipe et a provoqué des prises de conscience. « Beaucoup de personnes se sont questionné sur leur consommation, certaines ont même arrêté l'alcool ».
À travers Des Jours Meilleurs, Elsa Bennett lance un appel, il faut plus de centres, plus de places, plus d’écoute pour ces femmes souvent confrontées à la honte et la culpabilité. « Quand une femme prend la décision d'appeler et qu'il n'y a pas de places, est ce qu'elle aura envie de le faire 3 mois ou 6 mois après ? Est-ce qu'elle va trouver l'énergie de le faire, le désir, la conviction, la force de le faire ? C'est vrai que de retarder ces étapes là, c'est très compliqué. Certaines personnes sont vraiment dans des conditions très limites. ».
Loin de s’arrêter là, Elsa Bennett réfléchit déjà à la suite. « J’ai deux projets de films sur des sujets sociétaux que je vais écrire et réaliser seule. J’ai besoin que mes films aient un impact, qu’ils fassent bouger les lignes. »