VOS DROITS. Chaque semaine, Maître Déborah Carmagnani avocate au barreau de Nancy répond aux questions des lecteurs de ici-c-nancy.fr.
La réponse de Maître Carmagnani, avocate au barreau de Nancy. Image illustration DR
Question : Bonjour Maître, je tiens un site internet sur le thème du tourisme depuis 2003. Le problème est qu’à plusieurs reprises les contenus que j’ai mis en ligne ont été plagiés par un site commercial qui s’est permis de diffuser mes photographies et des morceaux entiers de mes articles. J’ai contacté le webmaster du site en question, sans réponse de sa part je pense à présent saisir la justice. Comment procéder ? Dois-je prendre un avocat ?
Lionel

La réponse de Maître Carmagnani, avocate au barreau de Nancy
La situation que vous me décrivez, plus communément appelée plagiat, relève au niveau juridique de la contrefaçon. Le droit d’auteur assure à chaque personne que son ou ses œuvres sont protégés face à la contrefaçon. Le droit de l’auteur de l’œuvre est protégé par des dispositions du Code de la propriété intellectuelle.
L’article L 112-2 du Code de la Propriété intellectuelle définit l’œuvre en question:
"Sont considérés notamment comme œuvres de l’esprit au sens du présent code: •Les livres, brochures et autres écrits littéraires, artistiques et scientifiques;
•Les conférences, allocutions, sermons, plaidoiries et autres œuvres de même nature;
•Les œuvres dramatiques ou dramatico-musicales;
•Les œuvres chorégraphiques, les numéros et tours de cirque, les pantomimes, dont la mise en œuvre est fixée par écrit ou autrement;
•Les compositions musicales avec ou sans paroles;
•Les œuvres cinématographiques et autres œuvres consistant dans des séquences animées d’images, sonorisées ou non, dénommées ensemble œuvres audiovisuelles;
•Les œuvres de dessin, de peinture, d’architecture, de sculpture, de gravure, de lithographie;
•Les œuvres graphiques et typographiques;
•Les œuvres photographiques et celles réalisées à l’aide de techniques analogues à la photographie;
•Les œuvres des arts appliqués;
•Les illustrations, les cartes géographiques;
•Les plans, croquis et ouvrages plastiques relatifs à la géographie, à la topographie, à l’architecture et aux sciences;
•Les logiciels, y compris le matériel de conception préparatoire;
•Les créations des industries saisonnières de l’habillement et de la parure. Sont réputées industries saisonnières de l’habillement et de la parure les industries qui, en raison des exigences de la mode, renouvellent fréquemment la forme de leurs produits, et notamment la couture, la fourrure, la lingerie, la broderie, la mode, la chaussure, la ganterie, la maroquinerie, la fabrique de tissus de haute nouveauté ou spéciaux à la haute couture, les productions des paruriers et des bottiers et les fabriques de tissus d’ameublement.
L’interdiction de toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle sans le consentement de l’auteur est illicite (Article L 122-4).
Voici ce que risque une personne accusée de contrefaçon d’après le Code de la propriété intellectuelle:
Article L335-2 : « Toute édition d’écrits, de composition musicale, de dessin, de peinture ou de toute autre production, imprimée ou gravée en entier ou en partie, au mépris des lois et règlements relatifs à la propriété des auteurs, est une contrefaçon et toute contrefaçon est un délit. La contrefaçon en France d’ouvrages publiés en France ou à l’étranger est punie de trois ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende. Seront punis des mêmes peines le débit, l’exportation et l’importation des ouvrages contrefaisants. Lorsque les délits prévus par le présent article ont été commis en bande organisée, les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 500 000 euros d’amende. »
Article L335-3 : « Est également un délit de contrefaçon toute reproduction, représentation ou diffusion, par quelque moyen que ce soit, d’une oeuvre de l’esprit en violation des droits de l’auteur, tels qu’ils sont définis et réglementés par la loi. Est également un délit de contrefaçon la violation de l’un des droits de l’auteur d’un logiciel définis à l’article L. 122-6. Est également un délit de contrefaçon toute captation totale ou partielle d’une œuvre cinématographique ou audiovisuelle en salle de spectacle cinématographique. »
Article L335-5 : « Dans le cas de condamnation fondée sur l’une des infractions définies aux articles L. 335-2 à L. 335-4-2, le tribunal peut ordonner la fermeture totale ou partielle, définitive ou temporaire, pour une durée au plus de cinq ans, de l’établissement ayant servi à commettre l’infraction. La fermeture temporaire ne peut entraîner ni rupture, ni suspension du contrat de travail, ni aucun préjudice pécuniaire à l’encontre des salariés concernés. Lorsque la fermeture définitive entraîne le licenciement du personnel, elle donne lieu, en dehors de l’indemnité de préavis et de l’indemnité de licenciement, aux dommages et intérêts prévus aux articles L. 122-14-4 et L. 122-14-5 du Code du travail en cas de rupture de contrat de travail. Le non-paiement de ces indemnités est puni de six mois d’emprisonnement et de 3 750 euros d’amende. »
Article L335-6 : « Les personnes physiques coupables de l’une des infractions prévues aux articles L. 335-2 à L. 335-4-2 peuvent en outre être condamnées, à leurs frais, à retirer des circuits commerciaux les objets jugés contrefaisants et toute chose qui a servi ou était destinée à commettre l’infraction. La juridiction peut prononcer la confiscation de tout ou partie des recettes procurées par l’infraction ainsi que celle de tous les phonogrammes, vidéogrammes, objets et exemplaires contrefaisants ou reproduits illicitement ainsi que du matériel spécialement installé en vue de la réalisation du délit. Elle peut ordonner la destruction, aux frais du condamné, ou la remise à la partie lésée des objets et choses retirés des circuits commerciaux ou confisqués, sans préjudice de tous dommages et intérêts. Elle peut également ordonner, aux frais du condamné, l’affichage du jugement ou la diffusion du jugement prononçant la condamnation, dans les conditions prévues à l’article131-35 du Code pénal. »
Article L335-7-2 : « Pour prononcer la peine de suspension prévue aux articles L. 335-7 et L. 335-7-1 et en déterminer la durée, la juridiction prend en compte les circonstances et la gravité de l’infraction ainsi que la personnalité de son auteur, et notamment l’activité professionnelle ou sociale de celui-ci, ainsi que sa situation socio-économique. La durée de la peine prononcée doit concilier la protection des droits de la propriété intellectuelle et le respect du droit de s’exprimer et de communiquer librement, notamment depuis son domicile. »
Ce qui est dit est donc très clair : seul l’auteur a le droit de mettre à disposition ses œuvres et de permettre leur utilisation. Nul autre n’en a la possibilité au préalable.
Si quelqu’un ne respecte pas ces dispositions, il enfreint la loi.
La situation dans laquelle vous vous trouvez semble donc bien correspondre à de la contrefaçon de vos œuvres, écrites et photographiques. Pour commencer, assurez-vous d’avoir les éléments qui prouveront que vous êtes bien l’auteur des œuvres en question ou que vous avez l’autorisation de vous en servir (fichiers originaux, mp, scan, etc… si vous avez un copyright ça marche aussi).
L’étape suivante consiste à prendre contact avec le "fraudeur" pour lui demander de cesser ses agissements et retirer ces copies. Vous avez déjà réalisé cette étape, sans succès.
La contrefaçon étant un délit pénal, vous pouvez vous rendre auprès des services de gendarmerie ou de police afin de déposer plainte, ou déposer une plainte avec constitution de partie civile près du Procureur de la République du Tribunal de Grande Instance du ressort de compétence du lieu de situation de votre site internet.
L’assistance par un avocat n’est pas obligatoire pour ces démarches. Vous pouvez cependant librement vous faire conseiller et assister par l’avocat de votre choix si vous le souhaitez.
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