Vos Droits. Chaque semaine, Maître Déborah Carmagnani avocate au barreau de Nancy répond aux questions des lecteurs de ici-c-nancy.fr
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Chaque lundi, les explications juridiques de Maître Carmagnani, avocate au barreau de Nancy répond aux lecteurs de Ici c Nancy / photo d'illustration

Bonjour,

Nous sommes propriétaires d’un logement au sein d’un bel immeuble du 19e siècle en plein cœur de ville. Le problème, c’est que jouxtant notre habitation un autre immeuble est squatté par des SDF toxicomanes accompagnés de plusieurs chiens, la porte d’entrée donnant sur la route est fracturée et ces personnes vivent à l’intérieur… Parfois, ils réalisent de petits feux pour faire chauffer leur repas à l’intérieur de cette bâtisse. Nous avons bien tenté de joindre la police début mars, mais à part un contrôle, elle ne fait rien. La maison appartiendrait à des héritiers qui se déchirent… Le problème c’est que nous craignons un incendie qui pourrait se propager à notre logement mitoyen. Que faire, pouvons-nous attaquer en justice les propriétaires afin de réaliser le nécessaire ? Nous craignons pour notre sécurité, si un incendie venait à se déclarer en pleine nuit ou lorsque nous sommes en vacances ??? Existe-t-il un recours ?

Carole  

maitrecarmagnaniLa réponse de Déborah Carmagnani, avocate au barreau de Nancy. 

 

Lorsqu'un logement est occupé illégalement, c'est à dire squatté, c'est effectivement normalement au propriétaire de faire les démarches nécessaires pour faire cesser ce trouble.

Pour récupérer son logement, le propriétaire a besoin de l'’intervention des forces de l'’ordre. Il ne peut pas procéder à une expulsion par lui-même, au risque de se voir à son tour poursuivi. La situation et les procédures diffèrent selon que le logement squatté constitue le domicile de son occupant (propriétaire ou locataire), ou pas.

Outre les situations de flagrant délit (avant 48 h d'’occupation), le simple recours à l’'autorité administrative (le préfet) est possible, dès lors que le délit de violation de domicile a pu être constaté par un officier de police judiciaire, qu’'une plainte a été déposée et que l’'introduction ou le maintien dans les lieux s’'est opéré à l’'aide de “manoeœuvres, menaces, voies de fait ou contraintes” (procédure organisée par l'’article 38 de la loi DALO du 5 mars 2007).

Si le logement n'’était plus habité ou laissé à l’'abandon, ce qui est visiblement le cas de l'immeuble mitoyen que vous évoquez, c'’est plus compliqué. Le propriétaire ne peut prouver qu'il s’agissait d'’un domicile donc il ne pourra pas bénéficier de la procédure précédemment exposée.

Première solution : le propriétaire engage une procédure civile. Il fait une requête d’'expulsion au tribunal d’'instance du domicile. Le juge signe une ordonnance d’'expulsion qui devra être transmise par huissier aux occupants du logement squatté. Un délai de 2 mois est accordé aux squatteurs pour quitter les lieux. En cas de refus de quitter les lieux, l’'huissier sollicitera le concours de la force publique auprès du préfet. 

Deuxième solution : le propriétaire porte plainte auprès de la police. Il engage alors une procédure pénale pour une infraction précise comme les dégradations causées à sa propriété. Le verdict du procès peut entraîner outre l’'expulsion, une condamnation du squatteur à une amende, ainsi qu’'à des dommages-intérêts.

Mais d'après vos indications et la situation conflictuelles entre les héritiers, cette perspective n'est pas près de se produire.

Une autre solution est envisageable: lorsqu’un immeuble présente un danger au vu de sa solidité, le maire (ou le préfet de police à Paris) peut engager une procédure de péril contre le propriétaire. Et si l’état de solidité de tout ou partie de l’immeuble ne permet pas de garantir la sécurité des occupants, des voisins ou des passants, le maire peut assortir l’arrêté de péril d’une interdiction temporaire ou définitive d’habiter dans les lieux. Le fait pour les squatteur de faire régulièrement du feu sans autre sécurité peut avoir endommager la solidité même de la maison squattée et mettre en danger votre maison mitoyenne.

Dans une procédure ordinaire (articles L511-1 et L511-2 du code de la construction et de l’habitation), le maire met en demeure le proprio de faire cesser le péril. A défaut d’exécution des travaux, l’arrêté de péril est posé (avec ou sans visite d’expert). Si le proprio le conteste, il peut commander une contre-expertise et faire un recours au Tribunal administratif qui décide ensuite s’il y a péril ou pas et dans quels délais les travaux devront être effectués (question de plusieurs mois), le maire peut alors demander l’évacuation du bâtiment.

Si le maire juge qu’il y a péril imminent (article L511-3 du code de la construction et de l’habitation), il saisit le Tribunal d’instance qui désigne un expert chargé de constater l’urgence et le péril imminent dans les 24 heures. Si l’expert conclut à un péril imminent, la prescription des travaux d’urgence est signifiée au proprio et le maire ordonne les mesures provisoires nécessaires pour garantir la sécurité, notamment, l’évacuation de l’immeuble, éventuellement accompagnée d’une interdiction temporaire ou définitive d’habiter. Ça peut être très rapide...

Sachez que la responsabilité du propriétaire du lieu où l'incendie est né est prévue par l'article 1384, alinéa 2, du code civil. Selon ce texte, « celui qui détient, à un titre quelconque, tout ou partie de l'immeuble ou des biens mobiliers dans lesquels un incendie a pris naissance ne sera responsable, vis-à-vis des tiers, des dommages causés par cet incendie que s'il est prouvé qu'il doit être attribué à sa faute ou à la faute des personnes dont il est responsable ». C'est le régime de responsabilité dit « de la faute prouvée ». Il a ainsi été reproché à un propriétaire une négligence dans la surveillance de son immeuble, un squatter ayant provoqué un incendie qui s'est ensuite propagé à l'immeuble voisin.

Une question juridique ? Faites nous parvenir un courriel à Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

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