VOS DROITS. Chaque semaine, Maître Déborah Carmagnani avocate au barreau de Nancy répond aux questions des lecteurs de Ici c Nancy.
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Chaque lundi, les explications juridiques de Maître Carmagnani, avocate au barreau de Nancy répond aux lecteurs de Ici c Nancy

La Question. 

Je ne sais vraiment pas quoi faire, face à une situation qui me dépasse. Je suis musicienne depuis plus de 30 ans et auteur compositeur depuis 20 ans, j’ai toujours rêvé d’être reconnue un jour, sauf que bien entendu ça ne s’est jamais fait. Aujourd’hui, je suis face à un gros dilemme avec une chanson très connue qui passe actuellement sur les ondes, il s’avère que la ressemblance avec l’une des miennes est assez troublante surtout au niveau des harmonies, pas tout à fait au niveau de la mélodie et sur le refrain. Je ne sais pas si ça vaut la peine d’engager des démarches, mais je me dis que j’ai tellement galéré dans ce domaine pour rester tranquillement dans mon canapé à me dire  « tant pis », bref je ne sais pas par où commencer...

Pascale D.

maitrecarmagnani

La réponse de Maître Carmagnani, avocate au barreau de Nancy

La loi reconnaît en tant qu’auteur toute personne physique qui crée une œuvre de l’esprit quelle que soit son genre (littéraire, musical ou artistique), sa forme d’expression (orale ou écrite), son mérite ou sa finalité (but artistique ou utilitaire). 

D’après le code de la propriété intellectuelle, l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit d’un droit de propriété exclusif dès sa création, sans nécessité d’accomplissement de formalités (dépôt ou enregistrement), pour une durée correspondant à l’année civile du décès de l’auteur et des soixante-dix années qui suivent, au bénéfice de ses ayants droit. Au-delà de cette période, les œuvres entrent dans le domaine public. Toutefois, en cas de litige, il est nécessaire de pouvoir apporter une preuve de l’existence de l’œuvre à une date donnée, soit en ayant effectué préalablement un dépôt auprès d’un organisme habilité, soit en ayant rendu l’œuvre publique et en étant en moyen de le prouver. 

Le droit d’auteur s’acquiert donc sans formalités, du fait même de la création de l’œuvre. Votre création est donc protégée à partir du jour où vous l’avez réalisée. Cependant, en cas de litige, vous devez être en mesure d’apporter la preuve de la date à laquelle votre œuvre a été créée.

En l’espèce, votre œuvre musicale vous fait bénéficier du droit d’auteur à partir du moment où vous l’avez réalisée. Toutefois, en cas de litige, se pose le problème de la preuve de la création et de la datation de l’illustration.

Plusieurs solutions s’offrent alors à vous :

_ Si vous êtes inscrit à la Sacem, plus de problème. Une partition à faire ou un enregistrement à fournir, un formulaire à remplir et votre œuvre est protégée. Aucune restriction quantitative, le service est à la hauteur de vos capacités créatrice. Encore faut-il pouvoir adhérer à la Sacem et remplir les conditions d’admission. 

_ Le Snac est le Syndicat National des Auteurs et Compositeurs de musique. C’est une alternative possible et plutôt simple à effectuer. Le dépôt peut se faire par courrier : SNAC — 80 rue Taitbout — 75 442 Paris Cedex 09. La protection dure 5 ans et vous coûtera tout de même la somme de 32 € pour 4 chansons ou composition musicales (il n’est pas nécessaire d’adhérer préalablement au SNAC).

Avant qu’une œuvre ne soit éditée, fixée sur un support, exploitée et qu’elle n’entre dans le répertoire d’une société d’auteurs (Sacem, Sacd, Scam), une période plus ou moins longue peut s’écouler durant laquelle ses créateurs vont être amenés à remettre des exemplaires de celle-ci auprès d’éventuels éditeurs, producteurs ou diffuseurs. Au cours de cette période, des difficultés peuvent surgir et, le ou les auteurs, peuvent souhaiter être en mesure de faire la preuve qu’ils sont bien les créateurs de cette œuvre à une date déterminée.

_ Le site Copyrightdepot.com propose un service de copyright. Le site enregistre une déclaration de droits d’auteur auprès de Maître Francine Roussin, notaire (en l’affichant sur Internet). Le service coûte 6 euros par chanson ou compositions musicales avec un seul paiement une fois pour toutes. La protection est valide dans tous les pays où la loi reconnait le rôle des notaires. En utilisant Copyrightdepot.com, vous démontrez, devant la loi et publiquement, que c’est vous, et personne d’autre, qui êtes le créateur de l’œuvre en question. Le service, créé en mars 2000, compte des utilisateurs dans plus de 32 pays. Chaque création est alors protégée par un SCEAU OFFICIEL COPYRIGHTDEPOT.COM numéroté et joignable à la création. Il suffit, à une personne qui désire vérifier, de consulter le site Copyrightdepot.com pour obtenir confirmation que l’œuvre en question est bien enregistrée par son auteur. 

_ L’enveloppe Soleau, c’est un moyen de preuve simple fourni par l’INPI (L’Institut National de la Protection industrielle). Il suffit d’acheter une enveloppe dite Soleau et de mettre les documents à protéger à l’intérieur en respectant les règles de dépôt. Le service coûte 10 euros, mais permet de mettre plusieurs partitions à l’intérieur. 

_ Un simple envoi à soi-même, cacheté, en recommandé, constitue un moyen de preuve. C’est si simple que cela mérite d’être fait à défaut d’autres moyens plus sûrs.

Si vous contestez la date d’une création ou du projet de quelqu’un, vous devez saisir un tribunal compétent. Le président du tribunal demande alors à l’INPI de désarchiver l’enveloppe pour qu’elle soit produite comme preuve. C’est la comparaison du contenu des deux volets qui authentifie le document. 

Attention, une fois l’enveloppe ouverte, conservez-la précieusement, ainsi que la copie éventuelle du jugement ou du procès-verbal.

Dans votre cas, il semblerait que vous n’ayez fait aucune démarche afin de protéger vos illustrations. Même si vous bénéficiez du droit d’auteur concernant ces œuvres, la difficulté pour vous, si vous saisissez le Tribunal, serez-vous à même de prouver que vous avez créé cette œuvre musicale et que cette création a eu lieu avant l’utilisation faite par un autre ?

Vous pouvez cependant remédier à la situation pour l’avenir en protégeant vos chansons dès ce jour avec une enveloppe Soleau, par exemple.

Les infractions aux droits d’auteur sont sanctionnées pénalement (CPI, art. L. 335-1 à L. 335-10). En cas d’atteinte à ses droits, le titulaire du droit d’auteur dispose de l’action en contrefaçon qu’il peut exercer soit devant les juridictions civiles ou administratives pour obtenir réparation, soit devant les juridictions répressives pour obtenir des sanctions pénales. Deux actions distinctes sont donc possibles.

La violation des droits d’auteurs est constitutive du délit de contrefaçon puni d’une peine de 300 000 euros d’amende et de 3 ans d’emprisonnement (CPI, art. L. 335-2 s.). Des peines complémentaires — fermeture d’établissement, confiscation, publication par voie d’affichage de la décision judiciaire — peuvent en outre être prononcées.

Le code de la propriété intellectuelle entend par contrefaçon tous les actes d’utilisation non autorisée de l’œuvre. En cas de reprise partielle de cette dernière, elle s’apprécie en fonction des ressemblances entre les œuvres. La simple tentative n’est pas punissable.

La loi incrimine au titre du délit de contrefaçon, « toute reproduction, représentation ou diffusion, par quelque moyen que ce soit, d’une œuvre de l’esprit en violation des droits de l’auteur, tels qu’ils sont définis et réglementés par la loi » (CPI, art. L. 335-3).

Au niveau pénal, vous pouvez donc porter plainte, dans les 3 ans suivant l’acte de contrefaçon, ans un commissariat de Police, une brigade de Gendarmerie ou directement en adressant un courrier à M. le Procureur de la République de votre lieu de résidence, pour dénoncer les faits, et en prenant soin d’y adjoindre un maximum d’éléments de preuve. Vous pourrez ensuite vous constituer partie civile pour demander la réparation de votre préjudice (manque à gagner, préjudice moral...).

Au niveau civil, vous pouvez assigner l’usurpateur par devant le Tribunal de Grande Instance, dans les 10 ans suivant l’acte de contrefaçon, par le truchement d’un avocat et demander la réparation de votre préjudice.

Une question juridique ? Faites nous parvenir un courriel à Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

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