Entretien avec Laurent Garcia, maire de Laxou et député de Meurthe-et-Moselle que nous avons interrogé sur le quartier des Provinces, mais aussi évidemment sur la loi de sécurité globale pour laquelle il a voté en première lecture.
Vous militez pour une maison France Services au sein du quartier des Provinces à Laxou, pouvez-vous nous expliquer ce qu’est une structure France Services ?
Laurent Garcia : C’est un souhait du gouvernement qui a lancé les appels à pré-projets pour pré-labellisation de structures France Services. D’une part, dans les territoires ruraux parce qu'il y a une perte des services publics en tout cas un éloignement des services publics avec le citoyen, mais également dans les quartiers denses dans le cadre des quartiers de priorité nationale de rénovation urbaine. Il s’agit de choses nouvelles afin que chaque français soit à moins de trente minutes de services publics. Suite aux gilets jaunes, on sent bien qu’il y avait un besoin en milieu rural et c’est surtout là qu’il y avait une problématique, mais c’est également élargi aux quartiers retenus d’intérêt national en tant que quartiers prioritaires dans le cadre du nouveau programme national de rénovation urbaine. En tant que Maire, j’ai envoyé un courrier à Gérald Darmanain et je pose une question orale au gouvernement le 8 décembre à Jacqueline Gourault, ministre des Relations avec les collectivités locales pour insister sur ce besoin de maisons au sein du quartier des Provinces de Laxou.
Vous avez écrit une lettre à Gérald Darmanin pour intégrer à cette structure France Services, le poste de police des Provinces...
Je dis pourquoi ne pas intégrer au sein de cette maison France Services un poste de police. Il se trouve que depuis quelques mois maintenant et c’est une vraie perte pour la commune, ce poste de police nationale est fermé. J’ai écrit au ministre de l’Intérieur en l’alertant sur le fait qu’au sein de cette maison France Services, il y a besoin d’un poste de police au quartier des Provinces qui ne doit pas être déserté par la police nationale. Il y a toujours eu un poste et il est fermé depuis quelques mois pour des raisons d’affaissement du bâtis. Mais à la base c’est le besoin de services publics au sein du quartier des provinces qui est le déclencheur et donc je demande de faire d’une pierre deux coups.
Quel est le calendrier du plan de rénovation urbaine du quartier des Provinces ?
Les premières démolitions doivent avoir lieu au premier trimestre 2021, on voit enfin le bout du commencement. Il y a dix ans de boulot, c’était le préfet Bartold qui était encore là et Manuel Valls qui était à Matignon. J’étais maire à l’époque et je dois reconnaître que la préfecture et l’État avaient été à nos côtés depuis le début pour que les Provinces puissent être dans le deuxième tour de rénovations urbaines.
Laurent GARCIA, député-maire de Laxou
Pourquoi avoir voté pour la loi de sécurité globale ?
Je l’ai voté sans enthousiasme, cela dit quand on est à 18 mois d’une élection présidentielle, tout est polémique, donc on va rentrer dans un moment durant lequel tout le monde a en tête la présidentielle, il faut bien avoir ce calendrier-là en tête. Ça n’excuse en rien le fait que cela a été très mal expliqué. C’est quelque chose qui fait consensus, on veut protéger ceux qui nous protègent, et ce dans leur vie personnelle, familiale, que leurs enfants ne soient pas ciblés sur les réseaux sociaux, que l’on n’appelle pas les femmes des policières à être violées ou les policières à être assassinées, c’est de ça qu’il s’agit sur le fond. Lorsque l’on n’est pas entendu, mal compris ou que l’on s’est mal expliqué, il faut le reconnaître humblement et bien on fait « reset » et on réinitialise le process d’autant que le travail parlementaire est là aussi pour ça. Tout le monde dit la loi a été votée, non l’Assemblée nationale a voté en première lecture un texte, il se passe quoi maintenant ? Le bicamérisme, le fait qu’il y ait deux chambres en France, fait que cela doit aller au Sénat qui va réécrire le texte, cela dit il est en majorité LR qui a voté à l’assemblée pour le texte. Mais il faut entendre la société, le Sénat va réécrire quelque chose, le Premier ministre a dit lors des questions au gouvernement la semaine dernière qu’il allait saisir le Conseil constitutionnel. Ce texte-là n’en est qu’au début de son cheminement parlementaire.
Comment corriger le tir ?
Certainement pas en faisant ce qu’a dit le Premier ministre en demandant à une commission indépendante de réécrire le texte. Depuis quand dessaisit-on le parlement de ses missions de base ? C’est au parlement de se saisir de la réécriture du texte et pas seulement de l’article 24, ça peut être de tout le texte. Encore une fois, l’idée du texte elle fait consensus, protégez ceux qui nous protègent. Pour autant, que ceux qui nous protègent soient irréprochables. Voir ce que l’on a vu avec les quatre policiers qui s’acharnent, ça, c’est inacceptable. Je pense que ce qui n’a pas été compris ou mal expliqué ou monté en épingle, c’est qu’il a été perçu d’une volonté de récrire loi de 1881 sur la liberté de la presse et ce n’est pas du tout le cas. C’est vrai, il y a eu des paroles malheureuses du ministre de l’Interieur lorsqu’il a laissé entendre que les journalistes allaient être accrédités ou pas, ça, c’est absolument inacceptable. Il y a eu une cascade de propos malheureux qui font que l’on arrive à cette situation. Le processus parlementaire va reprendre, j’espère que les oppositions qui sont si virulentes sur le texte se mettront autour de la table pour aider la majorité à réécrire le texte dans le respect de la liberté de la presse parce que c’est une prérogative du parlement et certainement pas d’une commission extérieure. On ne peut pas reprocher au groupe MODEM, de vouloir porter un coup de grâce à la liberté de la presse dans la mesure où nous avons été quand même le groupe parlementaire qui a porté les droits voisins.
Pour quelle raison avoir voté sans enthousiasme ?
Cette volonté de passer le texte à tout prix, il faut laisser du temps sur ce genre de texte d’une part, d’autre part c’est un texte qui était une proposition de loi, c’est à dire issue de deux parlementaires. Du point de vue du groupe MODEM et apparenté en voyant le fond, c’est plus un projet de loi, c’est au gouvernement de dire et d’affirmer que l’on veut protéger les policiers, les pompiers, les gendarmes de la vindicte populaire ou de l’appel à la haine comme on le voit d’ailleurs sur les réseaux sociaux.. On le vote sans enthousiasme, car on veut donner un signal à ceux qui nous protègent, on a entendu qu’ils ne veulent pas être livrés à la vindicte populaire et appeler sur les réseaux sociaux aux agressions vis-à-vis d’eux, ça devait être un projet de loi et non une proposition de loi.
30 dessinateurs ont réalisé des caricatures des députés ayant voté pour la loi de sécurité globale, que pensez-vous de la vôtre ?
Ma femme m’a fait remarquer que je n’avais pas le double menton que j’ai sur la caricature. Ce que je veux dire sur ces caricatures, très solennellement, je donne et je reconnais le droit évidemment à la caricature, c’était assez symbolique quand même. Le fait de se voir en caricature cela me faisait dire, il y a quand même à cause de caricatures, des gens qui ont été assassinés, on est en démocratie quand on voit ce droit à la caricature et ça fait du bien même si les quolibets qui étaient sous la caricature étaient relativement peu plaisants. Ma satisfaction c’est qu’en France, on a le droit de faire de la caricature et pourvu que ça dure.