Sifflements salaces, insultes sexistes, pelotages intempestifs et autres formes d'agressions sexuelles... À l'occasion de la semaine internationale de lutte contre le harcèlement de rue du 8 au 14 avril 2018, le département « Genre, sexualités et santé sexuelle » de l'Ifop publie ce mercredi une étude tentant de mieux appréhender un phénomène dont l'importance croissante dans le débat public a sans doute accéléré la décision récente de créer une nouvelle infraction « d'outrage sexiste ».
Mené auprès d'un échantillon national représentatif de taille conséquente (2 000 femmes âgées de 15 ans et plus), ce nouveau volet de l'Observatoire Ifop-VieHealthy.com du harcèlement sexuel s'interesse aux statistiques et aux différentes formes de harcèlement sexuel que les Françaises subissent au quotidien dans l'espace public et plus particulièrement dans les lieux où elles sont le plus répandues : la rue et les transports en commun.
Confirmant les tendances déjà observées dans les deux dernières grandes enquêtes réalisées en France sur les violences faites aux femmes (l'ENVEFF en 2000, l'enquête Virage en 2015), cette étude met en lumière l'ampleur et le caractère multiforme des atteintes sexuelles subies par les femmes dans ces espaces publics tout en apportant des informations précieuses sur le profil des victimes de cette forme très « genrée » d'insécurité.
Ainsi, au cours de leur vie, huit Françaises sur dix (81%) ont déjà été confrontées à au moins une forme d'atteinte ou d'agression sexuelle dans la rue ou les transports en commun. Et pour nombre d'entre elles, il ne s'agit pas d'une expérience lointaine qui remontrait à des années : une femme sur quatre (26%) y a été confrontée au cours des douze derniers mois.
Dans la rue comme dans les transports, les formes verbales ou visuelles de harcèlement sont les atteintes les plus répandues, au premier rang desquelles les sifflements (68%) et les regards insistants (68%). Aspect offensant beaucoup plus explicite, les gestes grossiers à connotation sexuelle (32%) et les remarques sexistes (34%) semblent, eux, un moins peu répandus dans ces espaces publics.

Ce n'est pas le cas des situations de pressions ou de menaces psychologiques que peuvent constituer le fait d'être suivie sur une partie de son trajet (44%) ou d'être abordée avec insistance malgré une absence claire de consentement (45%). Symptomatique du « harcèlement de rue », les approches verbales insistantes affectent ainsi une femme sur dix chaque année (10%).
Mais le harcèlement dans les lieux publics ne se réduit pas à des pressions verbales, visuelles ou psychologiques peut-on lire dans cette étude. Au total, 41% des Françaises ont déjà fait l’objet d’un contact sexuel imposé (frottage, pelotage, pénétration) dans un lieu public, sachant que leur proportion est tirée vers le haut par le nombre de victimes dans les transports (38 %, contre 21% dans la rue).
Ce chiffre global d’agressions sexuelles masque en effet de fortes différences entre les deux types d’espaces publics. Du fait de la promiscuité qu’impose notamment leur fréquentation à des heures de pointes, les transports apparaissent comme un terrain de jeu plus favorable aux frotteurs (30%, contre 13% dans la rue), aux attouchements sexuels (26%, contre 15%) et aux viols (7%, contre 4%).
Mais d’autres facteurs de risque ressortent, en particulier le fait de résider dans une grande agglomération - notamment dans des quartiers défavorisés -, d’avoir un niveau de vie faible ou d’appartenir à une minorité religieuse liée à l’immigration... Enfin, que ce soit dans la rue ou les transports, les jeunes femmes de moins de 25 ans sont de loin les premières victimes de harcèlement et ceci par tous les types de violences et d'espaces publics.