Vos Droits. Chaque semaine, Maître Déborah Carmagnani avocate au barreau de Nancy répond aux questions des lecteurs de ici-c-nancy.fr
La réponse de Déborah Carmagnani, avocate au barreau de Nancy.
Tout propriétaire est obligé d’entretenir son terrain. Cela concerne donc aussi votre voisin. Il s’agit d’une mesure générale.
Le propriétaire d’un terrain privé, qui laisse son terrain en friche, c’est-à-dire non entretenu, peut causer un préjudice aux propriétaires des terrains voisins. Ce préjudice peut être la présence de mauvaises herbes ou d’animaux nuisibles par exemple. Pour y mettre un terme, il convient d’adresser un courrier au propriétaire du terrain en lui demandant de défricher son terrain. En cas de refus, vous pouvez saisir le Tribunal d’Instance si cette absence d’entretien vous cause un préjudice. Encore faut-il que vous puissiez prouver que cette absence d’entretien vous cause grief.
A noter qu’il vous est possible de couper vous-même tous ce qui vient du terrain de votre d’un voisin et qui dépasse sur votre propre terrain.
Concernant l’absence d’entretien du fossé, contrairement aux eaux usées domestiques, il n’existe pas d’obligation générale de raccordement des constructions existantes ou futures aux réseaux publics traitant les eaux pluviales qu’ils soient unitaires ou séparatifs.
Il existe toutefois une servitude d’écoulement, c’est-à-dire que le propriétaire qui ne désire pas utiliser les eaux pluviales tombant sur son terrain peut laisser s’écouler naturellement vers le fond inférieur. Si vous ne souhaitez pas utiliser les eaux pluviales tombant sur votre terrain, vous pouvez donc les laisser s’écouler naturellement vers le terrain de votre voisin en contre-bas. Le propriétaire du terrain situé en contrebas, appelé fond inférieur, donc votre voisin, ne peut s’opposer à recevoir ces eaux, cela constitue pour lui une servitude.
Par contre, je tiens à vous préciser que concernant les eaux tombant sur votre toiture, vous devez faire en sorte de gérer leur écoulement pour qu’elles ne tombent pas sur le terrain de votre voisin.
En outre, le déversement d’eaux pluviales dans un fossé privé nécessite une autorisation de la part du propriétaire du fossé.
En l’espèce, si votre voisin ne peut pas vous empêcher de laisser les eaux pluviales tombant sur votre terrain s’écouler naturellement sur son terrain, il est en droit de vous demander de ne pas laisser s’écouler les eaux pluviales tombant sur votre habitation sur son terrain. Par ailleurs, si le fossé est exclusivement privé, et appartient à votre voisin, vous ne pouvez pas l’obliger à l’entretenir. Je dirai même qu’il pourrait parfaitement décider de faire disparaitre ce fossé qui lu appartient totalement, que vous n’y pourriez rien.
Il semble d’ailleurs être de bon sens que vous ne pouvez pas, non seulement demander à votre voisin de recevoir vos eaux de pluie, mais en plus de financer leur évacuation. Mettez vous à la place de votre voisin se situant en contre-bas : vous trouveriez cela probablement terriblement injuste. LA servitude signifie que votre voisin ne peut pas vous empêcher de laisser s’écouler ses eaux sur son terrain, mais pas qu’il doit en financer un écoulement satisfaisant pour vous.
Vous me précisez que lors des derniers orages vous aviez 5 cm d’eau dans votre maison. Si cela est dû à la mauvaise évacuation des eaux sur le terrain de votre voisin, je n’ose imaginer quelle hauteur d’eau se trouvait dans sa maison, lui qui se situe en contre-bas.
Si vous souhaitez que vos eaux de pluie s’évacuent de manière plus satisfaisante, rien ne vous empêche de faire les travaux nécessaires sur votre propre terrain, comme par exemple, la mise en place d’un bassin ou d’une fosse de récupération des eaux de pluie.
En fin, concernant la clôture surplombée de trois rangées de fils barbelées, installée par votre voisin, la possibilité de clore son terrain est donnée par l’Article 647 du Code Civil : « Tout propriétaire peut clore son héritage (…) ». Les textes ne prévoient pas de formalisme spécifique pour les modes de clôture. Ce sont les usages qui ont réglementé les pratiques, suivis ensuite par les Juges. Si vous êtes en lotissement, reportez-vous au cahier des charges et au règlement de lotissement qui précisent l’étendue de vos droits et obligations en matière de travaux (taille des murs de clôture, hauteur, superficie, nature des matériaux à employer, distance à respecter, etc.). Sinon, vous pouvez vous en remettre aux règles d’urbanisme en vigueur, c’est-à-dire au plan local d’urbanisme (PLU), si la commune en est dotée. Si la commune n’a pas établi de PLU, ce sont les règles générales du Code de l’urbanisme qui s’imposent.
Concernant la mise en place de barbelés, si la clôture de votre voisin se situe à une distance de 0,50 m de la limite de terrain, il est en droit de les installer. LA seule limite serait que vous soyez en mesure de prouver que votre voisin a installé ces barbelés dans le seul but de vous nuire. La preuve me parait difficile à apporter. De plus, il lui sera toujours possible d’invoquer le risque de cambriolage, s’il a des animaux, les soucis de vous protéger de l’intrusion de son animal sur votre terrain..... Votre voisin reste cependant responsable des accidents qui pourraient être causés par cette clôture, tout en précisant que si la clôture se situe sur son propre terrain, vos enfants n’ont pas le droit de pénétrer sur le terrain de votre voisin.
Dans certaines conditions, les barbelés peuvent même être placés à la limite du terrain, mais à condition d’être posés sur la face intérieure des piquets et de constituer une clôture ne permettant pas aux animaux de pouvoir causer des dégâts sur la parcelle voisine. En général, pour répondre à cette condition : les piquets doivent être distants de 2,50 m à 3 m et porter de 4 à 5 rangs de fil barbelé. Il a été jugé par la Cour de Cassation qu’en cas de clôture plus légère, le propriétaire pouvait placer sa clôture surmontée de barbelés à 50 cm en retrait de la limite commune afin d’éviter que ses animaux puissent atteindre les cultures ou plantations sur la parcelle voisine.
Une autre jurisprudence avait décidé que « un propriétaire ne peut édifier une clôture qui ne présenterait aucune utilité réelle dans le seul but de nuire a son voisin », en l’espèce édifier un mur garni de fil de fer barbelé en représailles aux mauvaises odeurs provenant de l’élevage du voisin ( cass.civ.3 , 30 octobre 1972, gp.1972 II somm.97). Vous noterez toutefois l’ancienneté de cette jurisprudence. De plus, à notre époque, les cambriolages sont plus fréquents et plus violents, et cela constitue un argument de force pour votre voisin. Enfin, vous aurez probablement du mal à prouver qu’il n’a établi cette clôture QUE dans le seul but de vous nuire.
Votre voisin peut donc surmonter sa clôture de fils barbelés, avec des précautions différentes selon l’emplacement de cette clôture.
Par contre, rien ne vous empêche de dresser votre propre clôture sur votre terrain afin d’empêcher vos enfants de s’approcher de celle du voisin et les prévenir de tout accident.
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