NJP- C’est à une soirée jazz classieuse que les spectateurs de la Manufacture ont pu assister le 13 octobre, grâce à deux groupes remarquables : les Lorrains de Ce2 Polars, talentueux interprètes d’un répertoire de musique de films policiers des années 70 en version swing ; et le crooner californien à la voix caressante, Gregory Porter.

Gregory-Porter2©Vincent-Soyez
Grégory Porter, une voix charismatique - crédit photo Vincent Soyez

  Samedi 13 octobre, la Manufacture a à nouveau été le théâtre d’une magnifique soirée jazz dans le cadre de la 39e édition du festival Nancy Jazz Pulsations.

  C’est d’abord le trio lorrain Ce2, qui avec son projet Ce2 Polars, a littéralement ouvert le feu sur un public saisi de stupeur par cette entrée en matière : des bruits de rafales de mitraillette et d’échanges de balles nourris éclatent alors dans la salle jusqu’alors paisible, faisant sursauter l’assistance. Mais le trio fait son entrée sur scène et, en voyant les musiciens arriver, la foule semble peu à peu reprendre ses esprits.

 Bien lui en prend d’ailleurs, car à peine installés, Gaël Le Billan, Mathieu Loigerot et Jean-Marc Robin attaquent avec la bande originale du film Le Doulos, nous plongeant sans transition dans cette fascinante atmosphère de film noir qui émane de leur album de musique de polars réarrangées façon swing. Pour rester dans la filmographie de Jean-Paul Belmondo, les compères se lancent ensuite dans une interprétation si effrénée de L’Alpagueur que la coiffure impeccablement gominée du contrebassiste succombe face à l’énergie de l’interprétation. Pas en vain d’ailleurs, car dès cet instant, la salle semble définitivement conquise.

  Est-ce parce que passent les fantômes de Claude Sautet, Jean-Pierre Melville, Alain Sarde ? Une étrange alchimie s’opère incontestablement entre ce répertoire cinématographique et son interprétation jazzy-swing. L’initiative de Ce2 permet ainsi – et ce n’est pas là la moindre de ses qualités – de mettre en lumière la richesse de cette musique de films, qu’on considère parfois à tort comme une simple illustration sonore complémentaire à l’image ; elle démontre avec talent la fonction narrative que peut recéler la bande-son lorsqu’elle est utilisée à bon escient au profit d’un cinéma intelligent. Car en quelques notes, sans le secours d’aucune autre image que celle des musiciens tout à leur musique, l’atmosphère est bel et bien là ; évoquant ces sombres polars d’autrefois.

  Outre Le Doulos et L’Alpagueur, on peut alors entendre et reconnaître les mélodies du Casse, du Cercle Rouge – dont Gaël le Bilan rappelle qu’il s’agit de la dernière prestation cinéma de Bourvil – de Max et les Ferrailleurs « avec Romy Schneider. Magnifique. Enfin, Romy Schneider aussi, mais le film ! » précise le pianiste, ce qui déclenche les rires des spectateurs. Ils sont en tous cas mis à contribution, Gaël Le Billan leur demandant malicieusement « Je suppose que vous avez tous reconnu le thème précédent ? » Comme quelques « Non » s’élèvent dans la salle, il met néanmoins fin au suspense. « C’était le clan des Siciliens ».

  Le thème du Parrain, par contre, impossible de ne pas le reconnaître. Et pourtant il est dynamisé, éclaté, rafraîchi par l’interprétation swing entraînante du trio ; par Mathieu Loigerot qui part en solo agrémenté de chant be-bop, et Jean-Marc Robin qui s’en donne à cœur joie sur sa batterie.

  Au final, on passe un si bon moment dans cette atmosphère de polar rétro jazzy et élégant que c’est avec regret qu’on les voit quitter la scène au bout d’une heure de show, hélas sans rappel – ce qui suscite une certaine incompréhension mâtinée de frustration. Certes, Gregory Porter doit jouer ensuite, mais pourquoi ce set ne s’offre pas la possibilité d’une petite prolongation ?

Gregory Porter : Une voix charismatique

Quoi qu’il en soit, le temps de tenter de commander un verre au bar pris d’assaut, les musiciens de Gregory Porter prennent place sur scène. Lorsque lui-même fait son apparition, vêtu d’une veste blanche sur un pantalon noir et des chaussures bicolores, mouchoir à la poche, l’acclamation du public trahit son impatience d’entendre le fameux baryton, dont le premier album, Water, n’est pourtant sorti qu’il y a deux ans.

  Mais il faut bien avouer que la voix chaleureuse et grave de ce crooner n’a besoin d’aucun artifice ni d’aucun délai pour séduire. Elle est sa plus grande élégance, dans un set qui n’en manque pourtant pas.

  Quand le géant Gregory Porter entonne d’une voix de velours « I fall in love too easily… I fall in love too fast », on ne peut s’empêcher de penser que c’est justement là l’effet que produit sa musique : en un rien de temps, on en tombe irrémédiablement amoureux.

  Et elle est admirablement servie par des musiciens hors-pair ; tantôt ce sont de sublimes séquences de piano qui introduisent les chansons ; tantôt c’est le saxophone qui chante, accomplissant des arpèges et des soubresauts prodigieux. La contrebasse et la batterie ne sont pas en reste, et chaque instrument a l’occasion de donner libre cours à sa fantaisie selon la couleur des différents morceaux interprétés.

  Car Gregory Porter ne se limite pas à la romance ; il maîtrise également les intonations Gospel ; les notes bleues du jazz et du blues comme la vibration trépidante de la soul. Souriant, il charme le public non seulement par sa voix et son phrasé délicat mais aussi par son énergie ; il n’hésite pas à esquisser des pas de danse sur scène, bat la mesure en de grands gestes de ses bras, salue les envolées solo de ses musiciens – le pianiste Chip Crawford, le contrebassiste Aaron James, le batteur Andrew Atkinson et le saxophoniste Yosuke Sato, tous excellents, il faut encore le dire –  et se fond avec eux dans la mélopée.     

  On perd alors à l’entendre la notion de durée : le magnifique concert s’achève à 23h30 après un unique rappel, mais en aurait-il fait vingt qu’on aurait tout-de-même eu le sentiment que c’était trop court, tellement la prestation était belle.

  Une dernière surprise attend toutefois les spectateurs qui auraient eu la bonne idée de s’attarder : près du comptoir où ses disques sont mis en vente, Gregory Porter est venu discuter avec les spectateurs anglophones pas trop intimidés.

  Croisé à la sortie, Claude-Jean Antoine, dit « Tito », fait remarquer avec justesse : « On avait tendance à croire qu’il y avait surtout des chanteuses de jazz, mais il y a aussi de grands chanteurs. La preuve ! »

  Au sortir d’un tel spectacle, on ne peut que lui donner raison.

 

Nancy Jazz Pulsations_ 39e Edition

Du 10 au 20 octobre 2012 à Nancy

 

Programmation Complète, Renseignements, Tarifs :

www.nancyjazzpulsations.com

Boutique Nancy Jazz Pulsations

106 Grand Rue

54000 NANCY

 

Informations, sites des artistes :

http://quivapiano.jimdo.com/ce2-polars/

http://www.gregoryporter.com/

Pin It

Les dernières infos

Les plus lus

27-03-2024 By Rédaction

Jobs d'été : la Métropole du Grand Nancy recherche des…

Meurthe-et-Moselle. La Métropole du Grand Nancy ouvre sa campagne de jobs d'été afin de pourvoir plusieurs dizaines d'offres ...

11-04-2024 By Rédaction

"Nature en Fête" se prépare au Parc Sainte Marie de…

LOISIRS. Pour la nouvelle édition de Nature en Fête au Parc Sainte Marie de Nancy, 125 exposants se déploieront à l'i...

18-04-2024 By Rédaction

Nancy : aménagements du secteur Jean-Jaurès et modification du plan…

Ligne 1. Dans le cadre des aménagements du secteur Jean-Jaurès à Nancy, des travaux interviendront du 22 av...