NJP 2012-Fort de ses deux décennies d'existence, Zita Swoon Group a trouvé son rythme de croisière, un album tous les deux ans suivi d'une tournée. Se cantonner à ce que l'on connaît déjà ? Hors de question! En perpétuelle recherche de nouvelles expérimentations le Zita Swoon Group, part à la rencontre de leurs contemporains et casse les frontières, tant artistiques que géographiques. En franchissant celle du Burkina Faso, Stef Kamil Carlens, leader du collectif et ancien membre du groupe rock dEUS, a rencontré Awa Démé et Mamadou Diabaté. Avec eux, il réalise l'album sorti en février 2012, wait for me. A quelques heures de présenter ce nouvel album au public de l'Autre Canal, Stef Kamil Carlens, a accepté de répondre à nos questions.
Vingt années d'existence ! Comment le collectif s'est-il créé ?
Comme la majorité des jeunes de 20 ans, on a commencé par faire un groupe de rock. Après un premier album, on s'est très vite rendu compte qu'il était plus intéressant de provoquer des interactions avec des disciplines et des artistes différents. On voulait s'échapper du carcan rock. En 1997, à travers la bande-annonce du film Sunrise (réalisé par F.W Murnau, NDLR) on a ponctué de longues parties instrumentales par des tonalités pop. Par ce premier projet, on a voulu allier musique et cinéma, mais également s'extraire d'une structure exclusivement pop et y intégrer d'autres influences.
Vous avez voulu créer de la nouveauté, quelque chose d'autre, est-ce que l'adjectif "alternatif" définit le Zita Swoon Group ?
On peut dire alternatif, mais... moi tout ce que j'essaye de faire c'est de m'extirper de telle ou telle case. Il y a la musique pop, rock, avec des morceaux de trois, quatre minutes. Après, à travers des formes de musique telles que le jazz, la musique classique une autre dimension musicale existe. L'idée d'être artiste c'est l'idée de se sentir le plus libre possible. Pour moi l'art permet de trouver la vraie liberté. Dans le passé, les règles de la "pop music" m'ont restreint puis poussé à voir plus loin, plus large. Désormais, j'essaye de traverser les frontières avec d'autres cultures, d'autres disciplines comme la danse, le cinéma...
Vous êtes passé d'un artiste catalogué rock à celui d’interprète de World music. Cette mutation a-t-elle provoqué des différences dans vos rapports avec le public et les médias ?
C'est pas toujours facile, la presse aime coller des étiquettes. Elle est spécialisée, presse rock, presse dédiée à la danse, ces arts sont rarement mélangés dans les médias. Pour le public c'est pareil, même si ces dernières années, les spectateurs se mélangent un peu plus, ils sont davantage multidisciplinaires. Mais bon, cela fait plus de vingt ans que l'on est occupé donc pour l'instant ça va (rires).
Venons-en à votre nouvel album, wait for me. Comment s'est organisée la collaboration avec la chanteuse Awa Démé ?
Nos voix s'allient facilement. Le seul problème avec Awa c'est que nous n'avons aucune langue commune. Heureusement, Mamadou Diabaté (Balafoniste, NDLR) parle français. Et puis, à force de travailler ensemble, on se comprend. La musique est un langage universel, on en est la preuve ! (rires).
Pouvez-vous nous en dire plus sur les conditions dans lesquelles l'album s'est élaboré ?
Pendant trois mois, nous étions au Burkina Faso. J'ai passé mon temps à observer les habitants, leurs modes de pensées, leur rapport à la musique, mais aussi comment la société est organisée ou ne l'est pas (rires). J'ai essayé de comprendre les circonstances qui peuvent expliquer l'état du pays et surtout son extrême pauvreté...pourquoi il y a tout cela ! Et c'est ce « tout cela », tous ces problèmes ont nourri les chansons.
Les musiques de l'album ne sont pas toutes des reprises de chants traditionnels ?
Non, Awa utilise bien souvent ses propres mots et les mêle à notre musique. Elle chante en dioula, ce n'est pas sa langue maternelle, mais ce dialecte à l'origine créé pour le commerce, prospère encore dans plusieurs états d'Afrique de l'Ouest, il peut donc être compris par de nombreux Africains.
Comment comprenez-vous ce qu'Awa chante, son état d'esprit lorsque, pour la première fois, elle dévoile ses paroles?
Quand tu travailles en Afrique, tu n'es jamais tout seul. Il fait trop chaud alors tu restes dehors où adultes et enfants sont présents au quotidien. La pauvreté est telle qu'une grande partie de la population n'a pas de travail, alors pour passer le temps, ils écoutent notre musique, fument. Lorsque l'on joue, je demande: « Qu'est-ce qu'Awa dit ? De quoi elle parle ? », les explications ne sont jamais les mêmes, mais le soir j'écoute mon dictaphone et prends des notes pour apprendre et décrypter les trouvailles de la journée. Et puis, une amie néerlandaise, mariée à un Malien a intégralement traduit les textes pour cet album.
En plus de cette tournée, je crois savoir que vous avez d'autres projets?
Zita Swoon Group a finalisé trois performances. En plus de l'album et de la tournée wait for me, nous accompagnons sur scène les projections de notre film, new old order. Enfin, le dernier projet, dancing with the sound hobbyist accorde notre musique avec les chorégraphies de Simon Mayer, un danseur autrichien. On aura la chance de présenter cette expérimentation à Strasbourg les 27 et 28 novembre, et à Metz le 29 novembre.
Le collectif Belge reviendra donc prochainement dans la Grande Région. Dates et informations sur les productions éclectiques et fantasques du Zita Swoon Group disponibles sur leur site internet officiel : http://www.zitaswoongroup.be/
